La Méditation est un outil précieux qui demande de l’investissement pour être mis en place correctement. C’est une pratique empirique dont la particularité réside, à priori, dans le fait qu’il est difficile d’envisager la bonne direction. Cela revient à devoir effectuer un trajet, dans un lieu inconnu, sans aucun moyen d’orientation. Il est donc facile de se perdre et/ou de douter de ses choix.

L’idée de cet article est d’essayer de baliser une voie, afin de permettre de ne pas s’essouffler, et de se concentrer sur l’essentiel : la pratique ! Le chemin, que je vais m’évertuer d’éclairer, représente une des multiples manières d’aborder la Méditation. L’intérêt étant que, quelles que soient les techniques adoptées, il soit possible de s’y référer en cours de route.

Au commencement

La première séance de méditation peut être assez déroutante. Il y a peu de situations qui proposent de complètement s’arrêter tout en restant conscient. Il est probable de s’entendre dire : « je n’y arrive pas, mon esprit vagabonde en permanence… » comme si se dressait un pic vertigineux qu’il serait question d’escalader à main nues sans la moindre expérience.

Plus qu’un sentiment d’impuissance, cela devrait représenter le postulat de départ. L’attitude statique met en évidence un fonctionnement primaire. Dans le silence, l’activité mentale n’est pas différente, mais surprend par sa dimension accaparante. Il devient alors possible d’être témoin de ce bouillonnement, qui est habituellement dilué dans les activités quotidiennes.

En temps normal, la meilleure stratégie pour éviter de se retrouver pris dans le tambour de nos pensées est « Le Faire ». Alors, dés le réveil, il est courant de dérouler les nombreuses tâches de la journée et, à la manière d’un joueur d’échecs, d’anticiper les dix coups à venir. Et puis, cette course effrénée commence, mobilisant complètement le mental. Pourtant, la moindre pause voit resurgir les pensées actives, consistant à se parler à soi-même, avec le désemparement d’être à nouveau pris dans l’anxiété inhérente à cette mécanique.

Une attitude adéquate

Fort de cette observation, une volonté déterminée peut se profiler de ne plus se laisser entraîner dans cette fuite en avant permanente. Ce n’est pas le choix le plus évident parce qu’il implique un désir impérieux de ne plus subir. Envisager la Méditation comme porte de sortie est salvateur, et permet d’entrer dans ce travail de fond de manière déterminée, comme si les fonctionnements passés terminaient leurs cycles. La Méditation représente l’outil ouvrant cette porte et permet à l’air frais d’entrer.

Pour que cela puisse réellement s’incarner, il y a une prédisposition forte qu’il est essentiel de dépasser : celle de voir cette pratique autrement que par la lorgnette de la réussite ou de l’échec. Il n’y a qu’un élément qui compte avec la Méditation c’est de le faire, quoi qu’il s’y passe, sans chercher une quelconque rentabilité à court terme. C’est à partir de ce moment que peut se tisser la toile qui permettra, en quelques semaines, de maintenir le mental à une distance suffisante, dessinant un nouveau choix : celui d’entendre sans écouter.

Développer une attitude positive envers soi-même est la condition sine qua non. Je la compare souvent à la même disposition que nous pourrions avoir naturellement envers des enfants en bas âge ou des animaux familiers. Il est question de respect, de douceur, de patience… Le processus consiste à décoller le nez de la vitre de l’identification au corps-esprit. Alors, si de l’impatience se fait sentir dans le corps, et que les pensées convergent dans ce même sens, il est question de l’accueillir dans cette zone de neutralité que nous connaissons parfaitement, mais dont nous faisons principalement l’expérience sur d’autres objets que soi-même.

Rien ne doit se passer

Bien sûr, la tendance avec la pratique est d’attendre que quelque chose se passe. Comme si, il serait naturel d’être transpercé par un éclair divin qui nous ferait passer d’un état de sommeil à celui d’éveil ultime. Mais il n’y a pas de magie et les nombreuses fausses idées circulant montrent simplement à quel point il est facile de s’égarer dans la puissance créative de l’esprit : l’imagination.

C’est l’inverse. Il ne doit rien se passer, parce que quelque soit l’expérience, elle ne va pas rester. Si tôt venue, déjà repartie, comment s’y référer ? C’est pourquoi un méditant ne va lui accorder aucune valeur, et va revenir dans la présence à ce qui compte vraiment : ici et maintenant, la réalité. C’est le coeur de la pratique et tout ce qui s’en éloigne n’est plus Méditation.

Cela met en évidence qu’il n’y a rien à faire. Les techniques sont là pour donner un support à l’esprit afin de le stabiliser. Mais ensuite, elles seront abandonnées parce qu’elles ne sont que des recours temporaires, rassurant, et canalisant ce mental sauvage.

L’immersion

Une fois la stupeur du constat décrit dans la première partie dépassée. Le processus naturel étant, à force de s’assoir, fermer les yeux et observer, pour le mental de rentrer en résilience.

C’est un élément préliminaire de mesure tangible que de constater ce changement radical. C’est-à-dire cet esprit, qui au bout d’un certain moment, permute comme dans un mode veille. Non pas qu’il ne soit plus là du tout, mais les pensées sont moins nombreuses et plus lointaines.

C’est concomitant avec le ralentissement biologique induit par le statisme qui permet au corps de se relâcher. C’est pourquoi la position corporelle est un élément décisif, qui doit permettre de soutenir le confort indispensable à l’immersion. Tant que le physique reste un obstacle, il n’est pas envisageable de s’inscrire dans la durée d’une part, et d’autre part, de s’abandonner assez pour glisser inexorablement vers l’état méditatif.

 
S'immerger dans la pratique méditative
 

La pratique personnelle

Lorsque cette mécanique décrite ci-dessus commence à être bien huilée, c’est le signe qu’un cap important est franchi. Celui de prendre conscience du support indispensable que la pratique procure. Chaque séance venant renforcer un peu plus les fondations de l’édifice tout entier.

La possibilité émerge, quand ce n’est pas encore le cas, d’envisager la pratique personnelle et quotidienne. Cela se fait à partir d’un élément déterminant : il devient plus difficile de ne pas le faire que l’inverse. En effet, la Méditation continue après la séance, et vient supporter cet espace d’accueil neutre dans lequel tout ne fait que passer, produisant une distance suffisante pour que le mental ne se remette à tourner en boucle autour de : il faut, je dois, et si…

C’est bien de cela dont il s’agit avec la Méditation. Apaiser la gestion de notre vie au quotidien en transformant l’attention, normalement monopolisée par l’esprit au travers des pensées, sensations, émotions… en la tournant vers cette pure présence à la vie elle-même. Dans cet espace de tranquillité les décisions s’éclaircissent, les interactions se fluidifient… Il devient possible d’observer que l’extérieur est bel et bien le reflet de l’intérieur.

Lâcher prise

L’élément majeur de ce changement de paradigme n’est pas le fruit du hasard. En cultivant délibérément le silence, l’apaisement, la tranquillité qui ont toujours été là, cachés par l’activité mentale, se découvre le véritable soi-même. Il est cet espace qui ne bouge pas, stable, pur et silencieux : le refuge.

C’est l’entraînement qui permet non seulement d’enlever le bandeau virtuel, mais surtout, en libérant de plus en plus d’espace, de gagner en confiance en la capacité de la vie à faire par elle-même. Il devient évident qu’interférer en dehors de toute spontanéité est partiale et fausse la danse.

Alors il est envisageable de s’abandonner à ce qui est plus grand que soi. Elle est là la véritable liberté permettant de devenir le spectateur bienveillant de ce qui arrive, quelle qu’en soit la couleur, sans immédiatement plonger dans la torpeur d’en être une éventuelle victime.

Des éléments factuels

Des paramètres plus concrets vont venir confirmer la bonne direction, comme le temps par exemple. Celui-ci va naturellement s’étendre, en passant des paliers significatifs. Cela n’a pas de valeur particulière autre que de constater comme la pratique se simplifie.

L’envie de le faire est un autre élément tangible. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas des jours où cela demandera des efforts, mais il y aura comme un appel qui fait que, même si des séances sont manquées, le désir sera d’autant plus fort de s’y remettre avec encore plus d’appétit.

Le dernier élément sera de réaliser, quand il y aura une coupure éventuelle de l’entraînement, la manière dont en quelques jours l’esprit reprendra les rênes. Il deviendra alors impérieux de trouver la cause de ce bourdonnement gênant, avant de réaliser que c’est le fait de ne pas avoir pratiquer pendant plusieurs jours qui redonne de l’espace aux anciennes habitudes.

Conclusion

Des éléments tangibles précisent la direction, qui est avant tout un travail de réconciliation avec soi-même. Plus je m’observe dans le silence, plus je suis témoin du fonctionnement, plus je suis en paix avec moi, mais aussi avec la réalité en cessant de vouloir quelque chose d’autre ou de différent. Il est essentiel de comprendre que ce travail est naturel. La force de celui-ci réside dans l’entraînement en laissant l’espace à ce qui vient de venir, ce qui part de partir, pour finalement réaliser ce qui est toujours là