Echange à l’issue du cours collectif du 23 mars 2018 / BOUFFERE

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Intervenants : Gaël (praticien), Gaëtan et Franck (participants)

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Transcription : Gaël et Franck

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Présentation

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Gaëtan, présent aux cours collectif depuis 2 ans, a mis sa pratique en suspens depuis un mois. Il a pourtant franchi un cap essentiel : il médite chaque jour depuis 6 mois. Ce soir, il évoque ce que certains appellent « le rappel de Méditation ».

C’est quand, après une pause dans la pratique, l’agitation reprend le dessus, que la Méditation nous hèle d’une voix forte, mais que l’on feint de ne rien entendre. Soudain, on perçoit la voix de Franck, méditant depuis quelques années, qui signerait chaque ligne de ce que dit Gaëtan, tant il se sent concerné :

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Une tendance à l’agitation

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  • Gaël : Gaëtan, comment s’est passée cette séance ?

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  • Gaëtan : C’est un retour, une sorte de rappel. Cela fait un mois que je n’ai pas médité en cours collectif.

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  • Gaël: Et ta pratique individuelle ?

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  • Gaëtan: Un petit peu, mais vraiment en dilettante. Depuis quelques temps, je retrouve cette tendance à l’agitation mentale, dans les énergies effervescentes. Ayant été longtemps inactif, je travaille désormais beaucoup. Ce soir, j’éprouve le besoin de retrouver un silence perdu, dans lequel j’ai puisé ma motivation pour venir.

La séance a été très chaotique : je suis moins endurant, comme quand je mets sur pause une pratique sportive. Bien entraîné, la séance se passait facilement. Mais, ce soir, le mental à flux tendu m’a empêché d’être pleinement présent. Il y a trop d’idées bouillonnantes en eaux troubles.

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  • Gaël : Par la pratique, on arrive à un certain point d’avancée : « Ok, j’ai vu les effets de la Méditation et je me relève, je relâche la pratique, je remets le visage au vent ». Cependant, tu constates rapidement que les bourrasques alimentent aussi une agitation hors norme. Le bateau commence à tanguer. Cela peut donner le mal de mer… Tu t’y remets aujourd’hui et tu te rends compte que cela ne revient pas si facilement, en claquant des doigts. Au contraire, tu t’aperçois que malgré les heures de méditation emmagasinées, il faut en réaccumuler afin de revenir au point d’équilibre temporairement perdu.

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L’émergence du discernement face à cette agitation

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  • Gaëtan : Ce qui me rend optimiste ce soir, c’est que je vois la dichotomie entre ce que je crois avoir lâché et la réalité de ce mental hyperactif.
  • Franck : C’est vrai qu’en général, il est plus facile de se méfier de ce qui n’est pas souhaité que l’inverse, comme si l’agitation professionnelle était obligatoirement positive pour soi.
  • Gaël : Il est très facile de se faire à nouveau duper par le vent force 8. Sauf que l’énergie, c’est toujours fluctuant, cela ne reste jamais. Tout est en mouvement, rien ne se fixe.

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  • Gaëtan : Oui, je le discerne mieux. D’ailleurs, quand le banc de méditation m’appelle, je sais apprécier ce moment. Mais, très vite l’agitation m’emmène dans le tambour de la machine à cogiter.

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  • Franck : Je vis la même chose. Je distingue maintenant mieux ce qui relève de mon imagination ou de la réalité, par une plus grande attention à l’instant. Quand je suis repris par l’illusion des projections, je sais plus précisément comment finit cette envie de briller : dans l’absence de discernement.

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La prise de conscience

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  • Gaëtan : J’ai vu aussi à quel point c’est instable que de s’élancer sans cesse dans les projets. D’autant que cela m’épuise mentalement. Puis, finalement, je réalise que ce n’est que la vitesse du vent qui m’exalte. C’est parce que c’est nouveau, mais cela ne dure pas… C’est grisant dans la réflexion, mais je ne fais que rebondir d’une idée à l’autre, comme une boule de flipper.
  • Gaël : La Méditation rend possible une plus grande constance. Même si tu es dans l’agitation, la pratique te montre que tu ne lui fais plus vraiment confiance.

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Croyance d’un lien de dépendance entre l’agitation et le fait de se sentir vivant.

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  • Gaël : En fait, grâce à cette agitation, tu as l’impression de te sentir vivant. Ce désir de rechercher sans cesse cette intensité s’effondre sur lui-même, par la prise de conscience que la vérité n’est pas forcément là. Puis, on peut réaliser qu’il n’y a pas à dépendre de cette énergie pour se sentir en vie.

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Dans une tempérance naturelle, la Méditation diminue l’amplitude de ces oscillations. Elle permet de monter beaucoup moins haut et de descendre beaucoup moins bas. Elle stabilise donc le mental et le perturbe moins.

Ce qui compte, c’est de s’inscrire dans la durée. La vie, comme la Méditation, exige de l’endurance, et non des qualités de sprinter.

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  • Gaëtan : J’ai été comme un jeune chien fou devant un bel os à ronger. J’ai eu le désir d’exaltation face à ma nouvelle activité. Une fois que les difficultés apparaissent, je suis déçu et frustré.

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  • Gaël : En plus, as-tu observé toutes les histoires que l’on se raconte avec ce nouveau jouet, toutes les projections ? Une véritable saga en plusieurs saisons dont le titre serait « le futur dans le présent ».

Finalement, les résultats ne sont pas ceux attendus. Ils suivent simplement leurs cours, dans une constance, où l’idéal rêvé se révèle en complet décalage avec la réalité.

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  • Franck : Pour ma part, j’ai inventé un mantra qui me colle à la peau : « ne te sens pas si bas parce que tu n’es pas si haut !».

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  • Gaël : La pratique, quelle que soit la force du vent, permet de ne plus se laisser dériver.

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  • Gaëtan : Moins emporté, plus modéré…

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  • Gaël : C’est exactement ça, mais il faut bien connaître ses habitudes mentales.

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  • Gaëtan : Cela faisait longtemps que je n’avais pas senti ce retour en arrière.

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  • Franck : Sans la Méditation, pour ma part, je ne le vois pas.

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  • Gaël : Sans outil, je ne vois effectivement pas comment ne pas être emporté par le courant.

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La croyance ancrée et alimentée

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  • Gaëtan : C’est vrai, je me suis toujours nourri de cette façon-là.

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  • Franck: Moi aussi. Une sorte d’euphorie mentale qui devient un réflexe.

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  • Gaëtan : Depuis toujours, j’ai 100 projets et autant d’idées qui vont avec. S’il y en a un qui s’arrête, alors la place est disponible pour un autre. Je ne sais pas si ce sont eux qui viennent à moi ou si c’est moi qui suis attiré par eux ? Au final, j’éprouve autant de plaisirs dans la suractivité mentale, que de frustrations en réalisant que c’est vain.

Se pose aussi la question de ma responsabilité. Avant, quand j’étais salarié, je déchargeais facilement mes griefs sur l’entreprise qui dysfonctionnait. Maintenant indépendant, je suis contraint d’assumer l’intégralité des implications. Est-ce bien raisonnable de se laisser embarquer par une énergie aussi tournoyante ?

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  • Gaël : Ce qui est bien, c’est que maintenant tu te poses la question. Avant, tu subissais sans même savoir que c’était là. Tu te disais que si tu n’étais pas dans cette énergie, alors tu n’allais pas bien, tu n’étais pas vivant.

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  • Gaëtan : C’était une valeur très forte !

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  • Gaël : Alors qu’aujourd’hui, tu retrouves cette énergie, mais tu ne te dis pas : « ça va bien ». Tu observes juste son pouvoir d’agitation que Franck partage aussi.

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La recherche de stabilité 

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  • Gaël : Peut-être commences-tu aussi à être plus clairvoyant, à observer le côté éphémère de tous ces désirs qui s’amoncellent. Autant d’Everests difficilement atteignables, qui épuisent par la raréfaction de l’air. Le mental possède une force d’inertie, et quand il se lance, il alimente sa puissance créative, se lance encore, et déclenche une avalanche.

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  • Franck : Cela devient douloureux du fait de l’énergie destructrice qui prend le dessus.

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  • Gaël : Soit ça s’arrête de façon violente, soit tu arrives à t’en extraire. Mais pour ce faire, cela demande du temps, tant la pratique méditative est laborieuse à remettre en place. Ce que tu évoques, Gaëtan, est la gestion de l’énergie, dans la recherche d’un équilibre. C’est bien de le voir. Bienvenue à nouveau à l’atelier de Méditation !
  • Gaëtan : 1 mois sans venir et voilà mes histoires…
  • Gaël : C’est riche comme échange. 
  • Franck : Oui. C’est exaltant !