L’idée est venue avec Gaël, praticien de Méditation qui anime ce site, de partager mon expérience de douloureux chronique à travers la mise en place de la pratique méditative. Le travail que propose la Méditation laïque est d’observer le cheminement de la douleur, pour prendre conscience des mécanismes qui la majorent ou qui la minorent. C’est aussi l’occasion de découvrir un nouveau point de vue sur moi-même.
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Constat d’un état de nécessité
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Tumeur et douleur chronique
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A 32 ans, la santé n’est présente à mon esprit que lorsque je la perds. De violents maux de tête révèlent une tumeur cérébrale bénigne. Un hémangioblastome cérébelleux au cervelet qui sera enlevé avec succès. D’après certains neurologues, cette maladie est présente dans le corps dès l’âge de 5 ans, et a une potentialité de se développer ou non, en fonction des expériences de vie. Moi qui ne suis pas du milieu de la santé, je peux directement relier la tumeur à une période où je suis dans un schéma de réussite sociale, sans aucune attention à ma personne.
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Huit ans plus tard, persistent encore des séquelles de la maladie malgré une rémission complète. C’est la mémoire de la douleur, maline, car toujours présente. Ce fantôme, enregistré par le mental, je le traîne comme un boulet au pied. Cela se met en tension malgré moi : un puissant étau se resserre autour du crâne, écrasant les tempes et comprimant le front. Ce qui suscite une pression extrême du lobe frontal et temporal. Cette impression de « casque de douleur » s’exerce de manière permanente.
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Pour me soulager, des électrodes intracrâniennes me sont implantées en 2014 et 2015. Je peux les déclencher à volonté grâce à des télécommandes. Le but est de donner au cerveau une information qui brouille celle de la douleur en le bluffant, comme au poker. C’est bien, mais rien d’illuminant, car leurs efficacités sont très variables.
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D’électrodes en cliniques, j’ai fait le tour des possibilités médicales. Je suis comme le hamster dans sa roue, avec en commun une sensation de vide. Au final, que reste-t-il ? L’envie de vivre ! Oui, mais comment ? Jusque-là, un calme de nécessité m’était imposé, au risque de faire exploser le couvercle de la marmite. Mais, je ne pouvais pas me contenter de survivre, il me fallait trouver autre chose. C’est comme cela que je découvre, sans aucune conviction, l’atelier de Méditation.
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Épisodes dépressifs
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Pendant que je m’initie à la Méditation, c’est la mort de proches qui m’éprouve. Six en deux ans et demi. Cette confrontation brutale aux événements ultimes est insupportable, et mon corps parle. Pendant plusieurs mois, je vomis de la bile tous les jours. Le souffle se coupe, tout se bloque. Pourtant, rien n’apparaît d’anormal aux examens. C’est le signe d’une grave dépression, celle qui fait brancher ma pulsion de vie sur courant alternatif. Il y aura deux épisodes qui se dérouleront pendant l’été, à une période où je ne médite plus, l’atelier étant fermé.
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Je comprends que ce qui me conduit aussi loin dans l’obscurité est l’impérieuse nécessité de trouver des solutions pour faire face à la vie. La Méditation collective semble apporter des réponses et, en 15 jours, les vomissements s’arrêtent. Cependant, je ne souhaite pas encore pratiquer par moi-même, par peur de me retrouver seul en tête à tête. Je ne suis pas dupe du vacarme qui se joue à l’intérieur.
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Un choix déterminé
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Soudain, j’entends un clic, quelque chose de puissant qui surgit de moi : l’instinct de survie. Cette impulsion innée, automatique, qui me pousse et qui m’appelle. C’est le moment !
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C’est un choix déterminé entre la résilience ou la souffrance. Arrêter de vouloir ce qui ne me convient pas. Je décide de stopper mes compromissions et de prendre maintenant soin de moi. Le bon moment est venu de méditer une fois par jour.
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Mais, les obstacles apparaissent vite : difficulté à focaliser l’attention, paralysie de la respiration, absence de sensations, anticipation permanente liée à une intellectualisation excessive.
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Les symptômes de la douleur en Méditation
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Une concentration et une respiration difficile
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En méditant, plus je focalise mon attention, plus j’ai mal. Ce problème de concentration devient évident en pratiquant seul. Mais je dois y faire face puisque c’est un travail préliminaire incontournable. Pendant le 1er mois, la douleur est forte et je me demande ce que je suis en train de faire. Plus je médite, plus le mécanisme « douleur/concentration » est simple à observer, c’est une boucle : je focalise mon attention et cela fait augmenter mon ressenti douloureux caché auparavant par le bavardage mental. Puis, ma crainte de souffrir augmente les tensions. J’appréhende la pratique.
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La douleur bloque aussi la fluidité du mouvement respiratoire et son amplitude. Je suis sur la réserve. Les côtes ne bougent pas, les épaules se haussent et les mâchoires se serrent. Je prends conscience que je ne respire plus par les narines et que mon ventre reste immobile. C’est l’apnée de la douleur. La concentration et la respiration sont des vases communicants. Si la concentration est difficile, alors la respiration l’est aussi, et inversement. C’est un choc de se rendre compte que le corps et l’esprit se sont perdus de vue depuis si longtemps.
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L’esprit coupé du corps
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Avoir du mal à se concentrer, et donc à respirer, est le symptôme d’une déconnexion du mental d’avec les sensations corporelles. Mon enveloppe est devenue un corps étranger, y compris dans les relations physiques : « Ah oui, c’est vrai, c’était bien, tu as raison, je ne me suis pas rendu compte ». Si la pensée de la douleur occupe tout l’espace de mon esprit, alors les sensations corporelles sont absentes.
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Cet oubli du corps est renforcé par l’habitude mentale de me presser sans cesse à évaluer une situation, dans l’absence de spontanéité, de naturel. Anticiper, c’est imaginer l’instant d’après. Cela crée une « pré-douleur » au niveau des mâchoires. J’ai une crainte de me détendre, parce que je n’ai pas appris. Je remarque comme je suis routinier dans mon élan à éprouver, à endurer, et que l’apaisement est un état étranger.
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Tendance à subir
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Les expériences de vie difficiles me renseignent sur une tendance forte : supporter la souffrance par habitude. Dans le sport, j’entendais souvent : « Il faut savoir se faire mal ». Une expression bien masochiste à laquelle je m’identifiais. Dans les études, il fallait « ne rien lâcher » pour réussir. Je m’y identifiais. Dans le travail, l’humiliation était en phase avec une souffrance acceptée. Je me subissais en plein cœur de Stockholm et de son syndrome.
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Esprit passionnel et imaginatif
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Victime ou bourreau, j’ai un besoin de comprendre. C’est humain, et surtout illusoire. Des causes extérieures à soi, pour expliquer les situations, il en existe toujours. Mais, les raisons objectives ne me renseignent en rien sur le rapport passionnel que j’entretiens avec ma douleur, avec la vie. La passion, étymologiquement, renvoie à la souffrance, au sacrifice de soi. J’alimente ce rapport qui majore la douleur.
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Assis, la Méditation enlève un masque : la réalité est assez émouvante sans qu’elle n’ait besoin d’être colorisée à l’excès en rouge ou en noir. De plus, cette tonalité est systématiquement accompagnée d’une émotion :
« Quelles perspectives ai-je dans la vie ?
– Ma vie n’est-elle qu’une somme d’échecs, dans la douleur ?
– J’ai peur de passer à côté de ma vie. »
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Au bout de 4 mois de pratique, la réponse émotionnelle à ces questions est de plus en plus faible car mon imaginaire travaille moins. C’est ce que pointe la Méditation :
« Comment ça, ne rien imaginer ?? Même pas un petit point ?
– Non. Même pas. Rien.
– Ah bon ? Qu’est-ce qu’il faut faire alors ? Et un point plus petit, qu’on voit à peine ?
– Non. Rien. »
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Enfant, on m’a appris à tout imaginer par la forme d’un objet fini, comme un cube, un cercle. Adulte, il m’est impossible de me représenter l’infini, sans lui ajouter des limites, des contours. Appliqué à la Méditation, à la vie, à la mort, un concept imaginaire s’effondre de lui-même, comme un château de cartes.
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Au bout de 6 mois, les bienfaits physiologiques et psychologiques se ressentent. L’observation des mécanismes de la douleur amène à une meilleure connaissance de moi, de mes capacités ou de mes limites. L’outil est là, à mes genoux. Je n’ai qu’à m’asseoir.
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Les premières vertus libératrices de la Méditation sur la douleur
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Observer
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Je me contente, durant la grande partie des séances, d’observer. C’est la clé pour ouvrir les portes du relâchement. Cela déclenche naturellement une mise à distance émotionnelle. Si j’observe, alors j’accueille les émotions, comme je le ferai avec un ami de passage. Ainsi, elles ne se cristallisent pas. Si je porte mon attention sur mon ventre, il devient plus mobile. De cette manière, le cerveau prend l’air. L’oxygène permet aussi à la concentration de s’ancrer dans la douceur.
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Je m’habite enfin de nouveau, et perçois mieux la subtilité, la naissance du frisson. Les sens s’affûtent, et quand les nerfs sont à fleur de peau, j’apprends à apaiser le feu. Ce qui importe, c’est ce qui est là, au-delà même des pensées. Une liberté et une indépendance s’installent enfin entre moi et la douleur. Cet affranchissement n’est devenu possible qu’à partir du moment où je me suis autorisé à ne rien faire.
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Apprendre à ne rien faire
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J’ai toujours vécu l’idée de « faire » comme une valeur forte, symbole de vie : « C’est fou, je n’ai rien fait de la journée ! ». Cela semblait être la pire des choses qu’il puisse arriver. Logiquement, mon esprit associe d’emblée « ne rien faire » à une forme de paresse. Mais la patience, indispensable à la pratique, a très vite balayé cette idée. Puis, de manière plus constructive, j’entends surtout le mot APPRENDRE.
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Au bout d’un an de pratique, je me rends compte que je ne sais rien : ni sur moi, ni sur la vie, ni sur autrui, ni sur le monde. J’en suis quand même secoué, dans la mesure où je me vivais comme aspirant à une connaissance illimitée, afin d’en maîtriser la vie. Seul le contrôle peut donner réalité à cette croyance. Lâcher ce rapport à la vie a été libérateur. Je pensais apprendre de la douleur en méditant, mais, en cours de route, c’est bien de moi dont j’ai dû faire la connaissance.
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Apprendre de moi
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Ancré dans mes certitudes, je me vivais comme quelqu’un de très calme, très posé. Pourtant, un jour, un thérapeute m’a demandé autoritairement de me détendre, allongé sur le dos, la gueule cassée par le néon aveuglant. J’avais une bombe lacrymo dans le regard, en le fixant. J’avais mal pris sa réflexion :
« Quoi ?? Mais je suis détendu, docteur !!!
– Ah bon ? Avec les jambes croisées ? Et les bras aussi ? Là, vous êtes au maximum de la détente ?
– Ah, oui, là non, vous avez raison. Je confonds tendu et détendu. »
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J’étais mon pire ennemi. J’avais une connaissance de moi limitée au reflet illusoire du miroir familial et social. Cependant, cette histoire avec le thérapeute m’a travaillé. La Méditation montre la vérité : il y a une grande différence entre ce que je crois savoir de moi et la réalité. Entre ce que je dis et ce que je ressens, entre ce que je pense et ce que je suis.
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Je pensais être quelqu’un de responsable puisque c’était inscrit sur la porte de mon bureau. Cependant, je m’en remettais au corps médical pour prendre la responsabilité de ma douleur. Ma carte vitale était devenue une carte de fidélité. Je râlais sans cesse contre les rendez-vous toujours trop lointains. Je ne prenais pas ma part.
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Encore une fois, la Méditation lève un voile : devenir adulte et se prendre en charge, alors que l’habitude est de transférer le fardeau à l’extérieur de soi. Je réalise qu’endosser la responsabilité me donne le pouvoir d’agir et non plus de subir.
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Ainsi, la plupart des croyances que j’ai sur la douleur, sur la vie, sur moi, s’effritent comme un vieux vernis. Je coupe, une à une, mes mauvaises peaux. Le brouillard se dissipe.
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Conclusion
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Par la pratique, le champ des possibles s’étend enfin à l’horizon : les premières petites résiliences, les victoires d’un jour, et donc peut-être d’une vie. La Méditation m’a invité à descendre en moi, à faire exister un éventuel armistice avec la douleur chronique. Elle m’a montré qu’une paix durable est finalement possible.
Aujourd’hui, la douleur est devenue un simple bruit de fond auquel je ne prête que peu d’attention. Elle est là sans être là. Avec la Méditation, pas grand-chose ne change, et pourtant tout change…
Salut Franck,
J’ai lu, relu et re-relu ton article …. Je ne sais pas comment le dire, mais quelque part, il m’accompagne dans mes « réflexions » et ma volonté de vouloir arrêter de me faire mal.
Continues à partager !
Salut Laetitia,
Merci pour ton retour. Ta phrase est forte : « volonté de vouloir arrêter de me faire mal ». C’est vrai que quelquefois, le rapport à nous-mêmes ressemble beaucoup au fait d’accepter ou d’arrêter de subir. Pour ma part, cela m’a pris quand même quelques années entre la prise de conscience et les actes. C’est un chemin. N’attends pas le chemin, construis le au jour le jour. C’est un vrai travail, çà !!
Bonsoir Christophe,
J’ai apprécié la lecture de ton témoignage qui est fort ..
Je comprends que les douleurs chroniques peuvent s’améliorer avec la méditation..je l’ai vécu aussi
Se recentrer sur soi , apprendre à prendre conscience de notre corps et esprit ;
Observer dans la pratique les pièces du puzzle qui se mettent en place, comme dit si bien Gael..
Merci Christophe
merci pour ce beau témoignage – je suis persuadée que la persévérance est la clé pour un mieux-être quotidien – je pratique moi-même la méditation chaque jour, et en groupe, depuis plusieurs mois, et je vois mes relations évoluer dans le calme et la sérénité
bonne continuation
Merci Danielle de votre retour. C’est vrai que de méditer chaque jour et de stimuler la pratique par l’atelier hebdomadaire est un duo motivant, car le collectif porte énormément et l’energie d’une pratique commune se ressent. L’équilibre est trouvé.
Merci encore
Bonjour Franck ,
En premier lieu, toutes mes félicitations pour ton article dense, synthétique et riche d’enseignements. C’est aussi un acte courageux de témoigner ainsi en mettant au jour tes hauts, tes bas et les enseignements que tu en as tirés. Enfin, ceux qui te côtoient savent le niveau d’engagement, de ténacité et de travail que cet article a exigé de toi, tellement cet exercice est exigeant.
En second lieu, en tant que douloureux chronique (céphalées de tension quotidiennes, diurnes depuis plus 1998) qui a commencé la méditation depuis 6 mois au sein d’un atelier animé par Gaël Brajeul, trois points ont attiré mon attention :
– La souffrance n’est pas la douleur. Tu en parles très bien. « Supporter la souffrance par habitude » : c’est exactement ce que j’ai vécu depuis mon accident aux cervicales de fin 1997. Je me suis habitué à avoir mal, un peu ou moyennement tout le temps, beaucoup parfois. Mais le plus pernicieux n’est pas l’intensité de la douleur mais sa permanence. Et delà nait la souffrance physique et psychique. Dans mon cas, cette souffrance s’est traduite par une usure inexorable de mon corps et de mon esprit, jusqu’à l’effondrement de fin 2015 (arrêt de travail de plus de 6 mois).
– Douleur chronique et difficultés de concentration. La permanence d’une douleur – même de faible intensité – finit par générer dans l’esprit un « bruit intérieur parasite ». Chez moi, progressivement, ce bruit a fortement altéré mes capacités de concentration (qui étaient déjà moyennes avant mon accident).
En 2016, n’étant plus en capacité d’assurer mes fonctions d’encadrement au sein de mon entreprise à cause du bruit intérieur trop fort (et grâce à mon arrêt qui s’est imposé à moi), je décidai d’y mettre fin. Cette décision, lourde de conséquences sur un plan professionnel et financier, n’apportait pas pour autant de solution à mes difficultés de concentration.
Les antalgiques et autres psychotropes (béquilles chimiques qui m’ont permis de « tenir » de longues années) et les séances d’électrothérapie n’ont amélioré en rien la situation (bien au contraire du fait d’effets secondaires de médicaments toujours plus puissants). Que faire alors ? Accepter la fatalité ou s’accrocher à un espoir ?
Depuis fin 2017, la pratique quotidienne de la méditation – et en particulier les exercices préparatoires de focalisation sur des parties de mon corps ou sur ma respiration – apporte un rayon de soleil dans ce contexte morose. Chaque jour, je constate une amélioration de ma concentration à travers de petites choses du quotidien. Ce sont de petites victoires qui m’encouragent à persévérer dans cette voie.
La méditation ne supprimera pas chez moi la prise de médicaments, tout au moins dans une première phase qui sera longue. Elle peut en revanche fortement m’aider à diminuer – tout comme mes électrodes crâniennes en sous-cutanné – la quantité et le dosage des médicaments. Allopathie et méditation sont donc très complémentaires ; d’ailleurs, les spécialistes les plus compétents (neurologues et algologues en particulier) le reconnaissent volontiers.
– Le lien entre émotions négatives et variations de la douleur. Dans mon cas, une exposition trop forte à des situations de tension, de conflit, à des personnes systématiquement négatives, génère en moi des émotions négatives qui augmentent l’intensité des céphalées. En quelques mots, la méditation m’a aidé à :
o prendre conscience de cette relation ;
o comprendre – et surtout accepter pacifiquement – que c’est vain de « vouloir changer » ma nature (émotivité et forte sensibilité).
o à commencer à me protéger, à prendre soin de moi-même en évitant déjà (autant que possible) de me mettre tout seul dans des situations de tensions potentielles. Ce n’est ni de la lâcheté, ni un manque de courage. Je le vois plutôt comme une meilleure connaissance de soi et de respect de ce que je suis vraiment. Comme tu l’écris si bien Franck, la méditation est aussi une invitation à « descendre en soi ».
Un grand merci Franck pour ton article et la lumière que tu apportes aux nombreux douloureux chroniques. Tu nous apprends qu’il n’y a pas de fatalité, de résignation. C’est un très beau rayon de soleil qui nous éclaire un chemin.
Fraternellement, Christophe – Clisson
Merci Christophe pour ce retour, quoi dire d’autre ? Que l’on apprend tous les uns des autres, dans l’échange, pour se libérer du rapport douloureux que l’on subit avec la douleur. C’est ce rapport qui change en méditant.
Un point essentiel est l’appréhension de la douleur qui est un problème dans la douleur chronique. L’appréhension de la douleur est identifiée, pour le cerveau, comme la douleur elle-même.
C’est une bonne nouvelle : cela signifie que de diminuer l’appréhension par la méditation va faire baisser la douleur.
Merci Christophe
MERCI FRANCK
bea
Bonjour Béa, merci pour ton retour ! Cela fait extrêmement plaisir de partager collectivement nos expériences.
Merci encore
Salut Franck
Merci d’avoir partagé ton expérience par une riche et belle écriture.
La définition de la méditation devient de plus en plus claire, ne rien chercher , ne rien attendre , tout est déjà là; il suffit de se poser et de prendre pleinement conscience de notre corps mais aussi de notre esprit, d’observer ce qui se passe….
C’est un cheminement qui pour moi est existentiel ;il me permet à chaque fin de séance de me sentir légère comme la plume de l’oiseau ou de ton stylo.
Des mots clefs: le lien corps-esprit, douleur-souffrance,être responsable de sa propre vie,la gentillesse avec soi-même,accueil, présence à soi, le présent ETC…
Je suis ravie de lire tes articles Franck , tu m’apportes beaucoup, je te remercie encore, continues…Sylvie
Salut Sylvie,
Quel beau retour ! J’ai été empreint d’émotions en le lisant, tellement ce que tu dis me paraît juste. On est sur le même chemin. Que dire de plus ? Que seul le fait de pratiquer amène à ces constats sur la Méditation, et donc aussi sur la vie. Comme dit Gaël, il ne s’agit pas de « comprendre » mais de voir par soi-même. Son exemple qu’il cite en atelier est très parlant : on peut lire des thèses entières sur « Le feu, çà brule », il faut quand même l’avoir expérimenter pour s’en rendre compte !
Merci beaucoup !
tres beau témoignage franck,tres reelle,beaucoup de liens entre la douleur et l’esprit,la douleur et soi meme…la douleur est notre ennemie,mais nous sommes aussi notre propre ennemi,nous nous voilons souvent la face ,parce que la société ne nous le permets pas tout le temps non plus…belle demarche du travail sur soi,mais quel travail difficile..la meditation m’aide egalement beaucoup,.j’espere pouvoir revenir vous rejoindre bientot ,le groupe,nos dialogues me manques a bientot et bon courage a toi(veronique )
Bonsoir Véronique,
Ton message me touche beaucoup, merci. C’est vrai que la société actuelle n’est pas aidante. Cependant, dans n’importe quelle société, on connaît tous des aveugles qui prétendent disserter sur les couleurs. J’ai subi cette obscurité aussi. Le questionnement, pour moi, a été de savoir ce qui me convenait, sans percevoir dans mon champ de conscience l’esprit collectif, qui n’est qu’un imaginaire handicapant et limitant.
L’atelier est une source de motivation collective irremplaçable. C’est un bel agencement de la méditation individuelle qui reste le but : la position officielle, face à soi. Seul. C’est ce que tu fais.
Je te dis quand même à bientôt et merci pour ce message
Merci pour ce magnifique témoignage et de partager ce processus avec ces hauts et ces bas de la pratique méditative. Sandra
Bonjour Sandra,
Quel cadeau pour moi de lire tous ces messages et donc le vôtre. C’est vrai que la Méditation amène à voir que les « hauts » et » les bas » sont tous les deux des « menteurs » de l’existence, qui nous illusionnent, dans la mesure où l’on se construit par tous les temps, que nos gueules se cassent contre le vent, ou qu’elles prennent le soleil.
« La vie ce n’est pas d’attendre que des orages passent, c’est d’apprendre comment danser sous la pluie. » (Sénèque).
Merci encore.
Merci pour ce magnifique témoignage, qui donne envie de persévérer dans la pratique
Merci à vous Daniele pour ce retour qui est autant d’encouragements pour moi à continuer à partager et à se réjouir à l’idée que oui, véritablement, les lignes peuvent bouger sur ce champ de bataille qu’est la douleur. Dans cette douleur, j’ai souvent fait la liste de ce que je ne serais plus, au lieu de voir ce que je suis de manière permanente. Je me suis longtemps « fixé » et figé dans la douleur comme dans un esprit-prison. Je me vivais comme une nature morte.
Et puis, à un moment donné, je me suis autorisé à me délester du poids qui empêche, léger de constater que l’enclume peut aussi être perçu comme une plume.
Merci pour ce retour.
Juste un petit mot pour exprimer mon respect et admiration face à la manière dont tu as géré et dont tu gères la douleur. Et heureuse que la méditation t aides à supporter l’insupportable. Peut un être un jour tu mapprendras… quand je serai prête 😉
<3
Bonjour Tchi,
Merci pour ce retour. Pour ce qui est d’apprendre à méditer, il est intéressant d’observer que chacun d’entre nous se trouve déjà dans un état méditatif de conscience modifiée dans certaines situations. La semaine dernière, je tenais dans mes bras un bébé de 2 mois. Bien calé dans mon fauteuil, je suis resté hypnotisé par cet être de vie deux heures d’affilée (j’avais de la chance, aucun cri ne s’était invité à mes oreilles !). Mon corps était totalement immobile. Ma respiration était calée sur la sienne. Mes yeux étaient dans les siens. De manière naturelle, elle et moi étions dans une présence de l’instant. L’enfant ou l’animal domestique nous placent obligatoirement dans le seul instant qui existe réellement : la réalité.
Puis, elle s’est endormie. J’ai alors fermé les yeux aussi et nos respirations s’épousaient. Le son de sa respiration me donnait de la musique dans la tête.
Tout était là : la respiration, la concentration pour ne pas la réveiller, l’immobilité de mon corps, la sensation de ce corps si fragile contre mon torse, le mental en suspens, la respiration… Une vrai méditation !
Salut tonton,
Après la lecture de ton article j’ai trouvé très intéressant cet espèce de « parcours » et de « décuplation » que tu associe à la douleur. Finalement, la douleur, serait plus fictive que nerveuse ? Comme une sorte de matière invisible qui se calque et se nourrit de chaque individu pour agir. Il est donc casiment impossible de donner une définition à la douleur puisqu’elle est propre à chacun, et se ressent ducoup à l’unique et ne peut pas avoir de définition.
Pour certains, une douleur peut être la sensation de vide, d’autres, la sensation de manque, et toutes les infinies possibilotés qui s’y collent font d’elle une sorte de chose indéfinissable. Comme la pensée, d’ailleuirs, n’y aurait t-il pas d’indéfinition pour la pensée ?
En tout cas, merci pour ton article, c’était super intéressant, hâte de lire tes prochains écrits.
Inès 🙂
Bonjour Inès,
Merci pour votre commentaire, je l’ai transmis à votre oncle.
Il vous répondra à suivre.
Ce que je souhaite simplement préciser est la différence entre la souffrance et la douleur. Cette dernière est d’ordre physiologique alors que la souffrance est d’ordre moral. Exactement comme la sensation de vide que vous évoquez et tout ce qui relève d’un domaine existentiel. C’est bel et bien définissable.
L’article met plus l’accent sur leurs relations. En effet, comme des vases communicant, elles interagissent et se nourrissent l’une de l’autre. La Méditation a la propriété d’agir sur les causes de la souffrance, et de cette manière influer sur le niveau de la douleur, qui est par définition mécanique, même si elle est fantôme, puisque que le corps-esprit est innocent et ne sait pas faire de différence.
Gaël
Salut Ines,
Merci pour ton retour. Ce que l’on peut dire est que la douleur est avant toute chose une information, comme celle du journal du matin dans ma boîte aux lettres. Que faire de cette information ? Le choix nous est donné. On peut se plaindre de cette mauvaise nouvelle. Mais, on peut aussi observer que la Méditation, par la seule répétition, a la capacité de modifier la perception de la douleur, et donc l’intensité ressentie.
Tu parles aussi des pensées. Pour un méditant, la pensée n’a aucune réalité car lorsque l’on médite chaque jour, on se rend compte que la pensée a un caractère grotesque, ridicule, car elle ne reste jamais très longtemps dans l’esprit, sauf à l’alimenter et à la nourrir. Elle semble très importante sur le moment, et puis, 5 secondes plus tard, elle est chassée par une autre qui paraît tout aussi importante, et ainsi de suite. Quelle est la valeur de ces pensées si importantes si elles ne durent que 5 secondes ? Aucune.
Faut-il en conclure qu’il ne faut pas penser ? Bien sûr que non. Il s’agit juste de l’observer. Il serait vain d’essayer de ne pas penser, car c’est impossible et non souhaitable. Le mental est une machine extraordinaire qui permet de créer, de construire, d’inventer, d’imaginer. Par contre, il n’est pas fait pour vagabonder comme un chat errant.